jeudi 11 décembre 2008

... et autres effets secondaires

«… et autres effets secondaires» est la vision des finissants du Conservatoire d’art dramatique de Québec sur la schizophrénie. Création dont l’écriture a été entamée l’an passé, ce spectacle est le fruit d’une réflexion sur les effets de cette maladie du cerveau autant sur l’humain qui en souffre que sur ceux qui l’entourent.

À la fois ludique et sérieux, «… et autres effets secondaires» dépeint la division de l’être que subissent les schizophrènes. On suit les déboires de Benoît qui a une vive obsession des femmes, d’une en particulier, qu’il cherchera en s’enfonçant toujours plus loin dans sa tête.

Traiter de cette maladie est risqué. Il est en effet facile de tomber dans le mélodrame, dans la caricature. Les étudiants du Conservatoire réussissent cependant à jouer avec les mots et les situations de façon à alléger le spectacle. Pas de grande morale, juste une histoire sincère. Le tout est un peu alourdi par les nombreux déplacements de chaises et de tables qui, à eux seuls, transforment le décor.

Bien que toujours en apprentissage, les finissants du Conservatoire d’art dramatique de Québec démontrent déjà un énorme talent. Surveillez ces jeunes pousses, elles fleuriront bientôt sur les planches des théâtres d’ici!
ANDRÉE-ANNE BRUNET

Avec Jean-Pierre Cloutier, Matthew Fournier, Marc Auger Gosselin, Catherine Hugues, Joëlle Bourdon, Jean-Philippe Debien, Myriam Huard, Hubert Bolduc, Lorie Caron & Stéphanie Perreault.
Texte original des comédiens
Mise en scène de Marie-Josée Bastien
Théâtre du Conservatoire
7 au 14 décembre 2008

mardi 9 décembre 2008

La Complainte de Dulcinée

Dulcinée Langfelder est reconnue comme une artiste complète en jeu, danse, chant, mime et conte. Et chaque fois, elle frappe sur la condition humaine avec ses propos tragi-comiques et son ironie assumée. La Complainte de Dulcinée, présentée à l’Espace Go, poursuit ce fil conducteur, habillant le rôle de Dulcinea, la muse jamais rencontrée du grand Don Quichotte de Cervantès. L’amoureuse parle, rencontre son amant et ce, à travers l’Histoire de l’humanité. Idée fort intéressante, quoique parfois complexe.

Ce spectacle d’une heure vingt minutes présente Dulcinée Langfelder, accompagnée de ses quatre techniciens multidisciplinaires, qui jouent eux aussi la comédie et se laissent même tenter par les numéros de chant. Ces derniers amènent une toute autre réalité à la pièce, rappelant bien que la fiction est reine. Les prouesses de l’artiste principale sont innombrables et incessantes. Impressionnant mais incohérent. En effet, malgré tout le talent scénique, le public se retrouve face à différents tableaux qui n’ont de lien que par le personnage. Toutefois, la variété est grandement considérable, passant d’une chorégraphie contemporaine à une caricature de reportage télévisé. Diverti, le public est cependant laissé à lui-même, et tente de comprendre l’histoire, si unique soit-elle.

Malgré cette faiblesse, Dulcinée Langfelder remplit bien le mandat qu’elle s’est donnée, soit de divertir. Les moyens techniques et multimédias sont remarquables et valent le coup. Bref, La Complainte de Dulcinée est une œuvre qui rend mal sa simplicité annoncée, mais nous fait passer une agréable soirée.

MARIE-EVE JACQUES
«La Complainte de Dulcinée»
De Dulcinée Langfelder & Cie
Espace Go
4 au 14 décembre 2008

jeudi 4 décembre 2008

Contes Urbains

Les contes urbains de la Licorne font jaser depuis déjà 16 années. 16 années durant lesquelles un public de fidèles auquel s’est joint une bande d’initiés ont découvert une multitude de différents textes d’auteurs, interprétés par une panoplie de comédiens au registre varié. Un moment unique où le spectateur se sent privilégié de se faire raconter des histoires, comme papa et maman le faisaient si bien avant le dodo. Cependant, les histoires jouées dans le théâtre intimiste de la rue Papineau ne sont pas des aventures conduisant à un doux sommeil…

Le fil connecteur est Montréal en hiver, thème duquel les écrivains devaient s’inspirer pour créer des nouvelles, des historiettes, des moments de rire ou de pleur pour un public très ouvert. Autre similarité retrouvée dans les sept tableaux? La langue, une langue accessible, parfois vulgaire mais toujours franche. On ne met pas de dentelles, on veut simplement accrocher l’oreille en contant des histoires. Malgré les petits accros des comédiens dans les différents textes qui rappellent l’acte théâtral en cours, on plonge à en oublier toute notion du temps. Pour une 16e année consécutive, le concept de joindre un auteur à un comédien, chapeauté par un metteur en conte est définitivement défi relevé!

ANDRÉE-ANNE BRUNET


Avec Joël Marin, David Boutin, Sébastien René, Linda Roy, Emmanuel Schwartz, Marie-Ève Perron et Didier Lucien
Textes de Yvan Bienvenue, Josée Bilodeau, André Ducharme, Danette Mackay, Greg MacArthur, Marie-Ève Perron et Harry Standjofski
La Licorne
2 au 20 décembre 2008

2008 Revue et Corrigée

Les Jeux olympiques de Pékin? Le 400e anniversaire de Québec? L’affaire Bernier-Couillard? Les coupes dans la culture? Si cela ne sonne pas une cloche, c’est que vous étiez partout sauf au Québec cette année. Le théâtre du Rideau Vert vous offre cependant la chance de vous rattraper dans la connaissance des dossiers chauds de 2008 grâce à son hilarante revue annuelle présentée jusqu’au 15 janvier 2009.

Comédiens, imitateurs, chanteurs, danseurs : la polyvalence même s’expose devant les yeux amusés des spectateurs. Une quarantaine de sketchs variant de 2 à 8 minutes défilent à un rythme effréné alors que Marie Carmen, les événements de Montréal-Nord, Fabienne Larouche, les chefs des partis politiques québécois et l’infatigable Denise Bombardier viennent faire leur tour, réclamant leur moment de gloire. Constamment à l’affût des derniers événements médiatisés, le metteur en scène Joël Legendre se laisse la possibilité de modifier ou d’ajouter des numéros à son spectacle.

Des fleurs se doivent d’être lancées à la talentueuse Véronique Claveau dont la voix se méprend à celle de la grande Céline et dont l’attitude est à pleurer de rire. Celle qui s’est fait remarquer après son passage à Star Académie revendique maintenant sa place sur les planches des théâtres québécois et c’est avec plaisir que les spectateurs l’accueillent.

Pour un point de vue ludique sur les élections américaines, la crise économique mondiale et la libération d’Ingrid Bétancourt, joignez-vous au cirque théâtral de «2008 Revue et Corrigée»!


ANDRÉE-ANNE BRUNET


Avec Véronique Claveau, Tammy Verge, Benoit Paquette, Suzanne Champagne, René Rousseau & Marc St-Martin
Texte de Pascal Barriault, Charles Gaudreau, Daniel Langlois, Nathalie Lecompte, Luc Michaud, Claude Montmini
Mise en scène de Joël Legendre
Théâtre du Rideau Vert
Jusqu'au 15 janvier 2009

lundi 24 novembre 2008

Les Pêcheurs de perles

Ayant la réputation d’élitiste, l’Opéra de Montréal met en place diverses stratégies afin de rejoindre un public plus large et surtout, plus jeune. Cet automne, l’organisme a réussi avec brio en présentant les Pêcheurs de perles de Bizet. Une tragédie simple, un triangle amoureux, comme l’on en voit souvent à l’opéra. Toutefois, le succès est dans la mise en scène et la présentation esthétique.

D’abord, le spectateur est introduit dès la première scène à un univers oriental, devant un décor des plus impressionnants et colorés. Des immenses palmiers surréalistes, de nombreux artistes chantant, riant et dansant. Durant les trois actes que dure la représentation, un monde incroyable rappelant les contes des mille et une nuits emmitoufle le public, impressionné devant cette myriade de couleurs chaudes.

L’accessibilité de l’œuvre est non seulement dans l’esthétisme, mais aussi dans la multidisciplinarité. En effet, en plus des chanteurs vedettes, une dizaine de danseurs professionnels enrichissent le spectacle, avec des chorégraphies simples, énergiques et appropriées. Les Pêcheurs de perles est une pièce où, malgré la tragédie, l’ambiance est à la fête et à l’exotisme. Un spectacle facilement accessible pour un nouveau public, curieux et avide d’art classique.
MARIE-EVE JACQUES
«Les Pêcheurs de perles»
Avec Karina Gauvin, Antonio Figueroa, Phillip Addis & Alexandre Sylvestre
Mise en scène d'Andrew Sinclair
Jusqu'au 13 novembre 2008

jeudi 20 novembre 2008

Le Petit Chaperon Rouge

Pour sa 10e édition, les Coups de théâtre ont cogné fort en lançant le festival avec Le Petit Chaperon Rouge de la compagnie française Louis Brouillard. Avec trois acteurs et deux chaises, Joël Pommerat nous offre une relecture fort intéressante du conte de Perreault.

La fillette ayant peuplé nos histoires de jeunesse nous apparaît dans un cadre contemporain à souhait où on découvre sa grande solitude face à sa grand-maman malade et sa maman éreintée et trop occupée pour apercevoir la douce détresse et le manque d’affection de sa fille. Nous plongeons dans cette version fort proche d’une réalité actuelle grâce à un narrateur désinvolte et ironique qui crée un décalage humoristique avec l’action se déroulant sur scène.

La pièce nous parle de la peur du danger et de la fascination que nous entretenons par rapport à ce sentiment. Le rythme exalté de la pièce et la trame sonore supportent un climat de tension incroyable. Chapeau aux brillants jeux d’ombres et de lumière permettant de faire croire à la présence d’un véritable loup sur scène.

Le Petit Chaperon Rouge de Pommerat resplendit donc par sa simplicité et permet un joyeux retour en enfance avec de ludiques clins d’œil à notre présent effréné.

ANDRÉE-ANNE BRUNET

«Le Petit Chaperon Rouge»
Avec Ludovic Molière, Isabelle Rivoal & Valérie Vinci
Mise en scène & texte de Joël Pommerat
Usine C
17-18 novembre 2008

lundi 10 novembre 2008

La Cadette

La Cadette est une jeune femme atteinte d’une maladie mentale. Une jeunesse qui pèse sur sa famille qui doit jongler avec ses crises de larmes et leur envie de se libérer du poids qu’elle représente. La Cadette évolue dans un univers familial où elle ne peut plus jouer les enfants. Elle décroche volontairement de son personnage atteint de maladie mentale pour s’adresse directement aux spectateurs, comme si son moi intérieur lucide et intelligent se révélait, déclenchant souvent un rire à la petite foule pendue à ses lèvres. La vie de cette famille commune prendra un tout nouveau tournant lorsque le Fou y mettra son grain de sel…!

Premier texte solo inspiré de sa propre situation familiale, La Cadette d’Annie Ranger est loin de la lamentation ou de la caricature. La brillante comédienne Marilyn Perreault offre une performance athlétique et renversante alors que le metteur en scène Martin Champagne nous emmène dans un univers ou le fantastique et le réalisme se font duel. La joyeuse troupe nous présente le monde de la maladie mentale dans la petite salle Jean-Claude Germain du Théâtre d’Aujourd’hui et nous invite a décidé de l’avenir de ces êtres souffrant d’une maladie encore bien trop méconnus…

ANDRÉE-ANNE BRUNET

«La Cadette»
Avec Julie Beauchemin, Marilyn Perreault, Marie Cantin, Sylvie Hétu, Claude Tremblay, Phillipe Laperrière
Mise en scène de Martin Champagne
Théâtre d'Aujourd'hui
21 octobre au 8 novembre 2008

samedi 8 novembre 2008

La troupe Baladeu'x et son spectacle «DOUBLE TOUR»

Une autre soirée incommensurablement renversante à la cité des arts du cirque. La troupe belge Baladeu’x était présente du 22 au 26 Octobre à la Tohu pour lancer leur nouveau spectacle Double tour en tournée au Québec. Les deux artistes aux multiples talents ont su charmer petits et grands à travers : prouesses de jongleries, danses, acrobaties, mimes, ainsi qu’une brève performance musicale. Parmi toutes ces expressions circassiennes, on peut constater que le duo de Baladeu’x est complètement débordant d’imagination et de créativité.


Un jeune couple d’amoureux qui vit son évolution autour d’une simple porte. La porte se transforme rapidement en véritable délire imaginaire où le couple partage jeux, plaisirs, passions et amour. Communiquant entre eux par le jeu perpétuel qui les anime, le couple « se relance sans cesse la balle » dans les situations de la vie quotidienne. C’est dans une mise en scène simple que l’on apprécie le véritable talent. Quelques éclairages très bien exécutés, une riche trame musicale et un décor (la porte) ingénieusement utilisé. La simplicité du spectacle est réellement surprenante, on se demande même comment arrive-t-il à nous transporter si loin avec si peu ?

La simplicité de Baladeu’x est certainement l’aspect qui rend le spectacle aussi touchant; prendre la vie à la légère, au moment présent, au jeu. Une courte épopée de tendresse qui offre une belle philosophie de vie, adoptée à Double Tour.

PATRICE OUIMET

«Double Tour»
Avec la Troupe Baladeu'x

Site internet de Baladeu'x

mercredi 29 octobre 2008

Eddy F. de Pute

Une maison fragile. Du gazon synthétique. Six jeunes. Assis, observant le public, attendant… Tout est prêt. Eddy F. de pute commence…

Eddy, adolescent en quête de vérité, après la mort de sa mère. Il quitte sa sœur et son père, fait face à la dure réalité en rencontrant un itinérant, une pute et un proxénète. La vérité est près de lui, mais la douleur et l’ambition de devenir un homme l’empêche de voir. Sa sœur cherche elle aussi, mais l’indépendance de son frère la laisse fragile. Puis, leur père : enragé, violent, atterré…

Le texte de Jérôme Robart est mis en scène par Fabien Fauteux, récemment diplômé de l’École supérieure de théâtre de l’UQÀM, dans une transposition du mythe d’Œdipe très crue, furieuse, voire « trash ». Les six jeunes acteurs se partagent non seulement la scène, mais les rôles. En effet, les personnages sont identifiés par un accessoire commun et sont joués différemment.

La compagnie UNThéâtre ose et provoque un public connaisseur. Eddy F. de pute n’est définitivement pas pour les âmes sensibles, ni les néophytes. Toutefois, c’est une belle occasion de voir à l’œuvre les jeunes créateurs.

MARIE-EVE JACQUES
«Eddy F. de pute»
Mise en scène de Fabien Fauteux
Théâtre Prospero
14 octobre au 1 novembre

mercredi 8 octobre 2008

Basso Ostinato

La compagnie Caterina Sagna est de retour à Montréal avec le spectacle Basso Ostinato et les danseurs Alessandro Bernardeschi, Antonio Montanile et Mauro Paccagnella. Deux hommes se retrouvent autour d'une table, discutant et ridiculisant le ballet diffusé à la télévision. La soirée s'annonce arrosée, les bouteilles d'alcool s'entassant progressivement. Rapidement, la télévision est remplacée par un troisième homme. Les conversations s'enflamment, se répètent. L'alcool fait son effet. Les discours sont confus, répétitifs. Les danseurs s'engouffrent lentement dans leur désespoir et se réfugient dans l'alcool qui devient leur prison illusoire. Le tout est de plus en plus complexe, violent, déchirant et confus.

Les danseurs sont d'une force et d'une précision remarquables. Leur fougue saisit le spectateur, qui tente de suivre leur chute, mais se retrouve souvent face aux interrogations sur les intentions de la chorégraphe. Toutefois, il est facile de se laisser embarquer par cette folie destructrice, grâce à l'humour allègeant, les textes évoluant dans la simplicité et surtout, les personnages attachants et sensibles.


Basso Ostinato est une belle introduction pour les initiés de la danse contemporaine, principalement en raison du côté théâtral auquel le public est plus familier. Définitivement, en sortant de la Cinquième Salle de la Place des Arts, on ne peut que se sentir bien, en ne saisissant toutefois pas ce qui nous a touché à ce point. Il faut croire que le subconscient en comprend beaucoup plus que nous le croyons !

MARIE-EVE JACQUES
«Basso Ostinato»
de la Compagnie Caterina Sagna
Cinquième Salle de la Place des Arts
1 au 4 octobre 2008

mardi 7 octobre 2008

La Fanciulla del West

Opéra de style américain, «La Fanciulla del West» de Puccini nous ramène au temps des cow-boys et de la ruée vers l’or. Minnie est la jolie tenancière du Polka, bar où les chercheurs d’or viennent boire, jouer et tenter de s’attirer les faveurs de la belle de la place. Bien malgré elle, Minnie se retrouve au centre d’un triangle amoureux dans lequel le shérif Jack Rance et le bandit Dick Johnson tentent de lui soutirer un ultime baiser. Le destin des trois se règlera lors d’une partie de poker décisive.

La musique est fort impressionnante et là-dessus, la chef d’orchestre Keri-Lynn Wilson mérite que nous lui levions notre chapeau. Il faut également souligner la mise en scène simple mais à la fois impressionnante lorsque tous les protagonistes se retrouvent sur scène. Coordonné autant de comédiens et chanteurs est un travail fort bien réussi par Thaddeus Strassberger. Cependant, nous avons l’impression d’assister à un «soap» américain avec tout ce que cela implique : répliques sans corps ni chair et expressions démesurément dramatiques. L’histoire est simple à souhait, voir versant dans le «quétaine».

Cela nous amène à nous questionner sur notre vision de l’opéra. Peut-être sommes-nous encore trop «vierge» d’opéra pour apprécier cet art à sa juste valeur? Nos références culturelles ne nous permettent peut-être pas de ressentir la profondeur des sentiments révélés par Minnie, Jack et Dick. Est-ce la raison pour laquelle cette pièce nous tirait davantage des rires que des larmes? La génération Y serait-elle trop «pressée» pour se laisser emporter dans le développement lent d’un opéra?

Qu’à cela ne tienne, c’est avec enthousiasme que l’équipe de Scène à Scène s’engage à assister à la prochaine production de l’Opéra de Montréal afin de s’outiller davantage pour mieux comprendre et critiquer cet art lyrique!



ANDRÉE-ANNE BRUNET


«La Fanciulla del West» de Puccini
Avec Susan Patterson, Julian Gavin, Luis Ledesma et Kristopher Irmiter
Mise en scène de Thaddeus Strassberger
Opéra de Montréal
20-24-27-29 septembre & 2 octobre 2008

lundi 6 octobre 2008

La vie devant soi

Madame Rosa, ancienne prostituée, femme de cœur et de corps, recueille le petit arabe Momo chez elle. Au fil des années, une complicité sans borne s’installe entre les deux personnages. Un amour inconditionnel naît, alimenté par l’innocence de l’enfance et l’expérience de la vieillesse. À travers les commentaires loufoques et naïfs du petit Momo, nous réfléchissons sur les différences sociales et sur les liens serrés qui peuvent se tisser entre des mondes opposés.

Catherine Bégin offre une prestation complètement renversante basée sur les dualités de son personnage, alors qu’elle livre une Madame Rosa dès plus charmante. Quant au jeune Aliocha Schneider, seulement âgé de 15 ans, il se taille rapidement une place dans le firmament des grands acteurs. Son jeune âge est loin d’être une entrave à la justesse de son jeu. Gardez son nom en tête!

Dans toute cette effervescence de talent, une petit ombre s’ajoute au tableau : les transitions entre les multiples scènes se font dans un noir qui s’étire et impatiente. Cette attente en vaut cependant la peine car nous retrouvons chaque fois plus d’humanité et de sensibilité dans les personnages. «La vie devant soi» est ainsi une belle réflexion sur une société bourrée de préjugés et un amour sans borne vivant malgré ces barrières sociales.


ANDRÉE-ANNE BRUNET

"La vie devant soi"
Avec Catherine Bégin, Aliocha Schneider, Pascal Rollin & Marco Ramirez
Mise en scène de Louise Marleau
Théâtre du Rideau Vert
du 23 septembre au 18 octobre 2008


dimanche 5 octobre 2008

ORGUE ET COULEURS invite l'OM

C’est dans la magnifique architecture de l’église Saint-Nom de Jésus dans le quartier Hochelaga Maisonneuve que j’ai assisté au grand concert d’ouverture du 10e festival d’automne d’Orgue et couleurs. Rien de moins que L’Orchestre Métropolitain du Grand Montréal et son chef Yannick Nézet Séguin pour introduire le festival. Tout d’abord, soulignons que le festival d’Orgue et couleurs est une formule innovante qui démocratise et colore la musique depuis ses débuts. L’organisme culturel à but non lucratif s’était donné pour mission : le partage de ses passions, la musique et l’orgue, avec tous les publics de l’est de Montréal. Aujourd’hui, le succès du festival rayonne sur toute la grande région métropolitaine.

Le spectacle a été introduit par une interprétation contemporaine d’orgue accompagné d’un ingénieux agencement de cuivres. Vibration, ambiance et émotion ont été ressentis dès les premières notes. Une grande aventure intellectuelle et émotionnelle en quelques minutes. Une belle découverte d’un instrument qui m’était si peu familier.

Puis Yannick Néz
et Séguin et son orchestre ont interprété trois morceaux aux disparités intéressantes : La Valse de Maurice Ravel, un extrait des Nuits d’été d’Hector Berlioz ainsi que les Tableaux d’une exposition de Modeste Moussorgsky. Ce qui est intéressant, c’est qu’avant d’entamer chaque morceau, le Chef partageait avec nous ses connaissances sur l’œuvre et nous proposait une vision en image en relation avec la musique. J’ai particulièrement apprécié cette approche, surtout parce que l’on tentait de démocratiser la musique classique.

Globalement, le concert fut un parcours débordant de saveurs et de couleurs éclatantes. Du rythme, des ambiances mystérieuses et des réflexions intéressantes. J’ai particulièrement apprécié l’œuvre de Moussorgsky, une interprétation très imagée et touchante à travers une sonorité riche.

Le festival d’Orgue et couleurs, une richesse culturelle à découvrir. Grâce à toute sa myriade d’activité, on peut aisément découvrir des nouveautés colorées et peut-être même une nouvelle passion pour la musique ?

PATRICE OUIMET

Allez découvrir ORGUE ET COULEURS
http://www.orgueetcouleurs.com

mardi 30 septembre 2008

Halpern et Johnson

En bref, Halpern et Johnson sont deux hommes liés davantage qu’il n’y parait. En fait, ils ont aimé la même femme leur vie entière. Leur rencontre à l’enterrement de cette dernière semble complètement absurde. Lorsqu’ils découvrent qu’ils chérissent la douce mémoire d’un même être disparu, leur réaction s’oppose. L’un, doux comme un agneau, veut se livrer. L’autre, rude et sec, refuse de croire qu’un autre homme ai pu partager la vie de son épouse. Léger, comique et dramatique à la fois, Halpern et Johnson illustrent la passion d’aimer et la magie de la vie.

Malheureusement, la pièce ne rejoint pas les 25 ans et moins. On esquisse un sourire, on rit à quelques blagues mais on n’est pas touché au cœur. Cette histoire semble d’une autre génération. Somme toute, les plus vieux y verront des références à leur propre vie alors que les plus jeunes verront deux «grands-papas» nostalgiques sur scène. Est-ce suffisant pour vous intéresser?
ANDRÉE-ANNE BRUNET
"Halpern et Johnson"
Avec Gérard Poirier et François Tassé
Mise en scène de Monique Duceppe
Théâtre Duceppe
du 10 septembre au 18 octobre 2008

lundi 29 septembre 2008

La Vie

C’est avec beaucoup d’enthousiasme que Scène à scène a eu le privilège de passer la soirée à la TOHU, certainement l’une des plus belles infrastructures culturelles au Québec. Le nouveau spectacle de la troupe de cirque les 7 doigts de la main y était présenté en grande primeur. On remarquera l’innovation, dès l’entrée dans la salle, par la présence de DJ Pocket qui a créé une atmosphère musicale et sonore hors du commun. À l’entrée des spectateurs, les artistes étaient déjà dispersés un peu partout dans l’assistance. C’est alors que nous étions déjà dans le bal.
"La Vie" aborde le thème du jugement dernier dans une optique contemporaine. A-t-on des regrets face à notre vie ? Considérons-nous l’importance de la vie au moment présent? Durant 90 minutes, on peut suivre le parcours d’une réflexion philosophique profonde sur la vie à travers le drame, les rires, les acrobaties, la musique et les dialogues percutants des personnages.
Les huit artistes multidisciplinaires incarnent des protagonistes séduisants et extrêmement stylisés. Leur jeu, riche et juste, témoigne d’un grand talent pour plusieurs aspects des arts de la scène. Notamment, Sébastien Soldevila, dans le rôle du maître de cérémonie, qui a donné une performance savoureuse. Il a su séduire le public québécois en quelques minutes…

Sommairement, il s’agit là d’une expérience importante à vivre dans la culture québécoise. Du grand talent, de l’innovation et beaucoup de plaisir sur scène comme dans le public.

PATRICE OUIMET

"La Vie"
par Les Sept doigts de la main
Tohu
du 23 au 27 septembre et 30 septembre 2008
1 au 4 octobre 2008
7 au 11 octobre 2008

Blue Man Group

Le Centre Bell explosait d’énergie et de rythme jeudi soir. Les percussionnistes bleus et leurs acolytes étaient à Montréal dans le cadre de leur tournée mondiale : « How to be a Megastar World Tour ». Le spectacle a été introduit par David Garibaldi, un peintre qui se distingue par ses portraits qu’il peint en quelques minutes. Après une vingtaine de minutes de création sous la musique rythmée et les encouragements de la foule, David Garibaldi a pondu quatre portraits à l’esthétisme renversant. Une approche des arts visuels que l’on se doit de découvrir.

Blue Man Group a définitivement ravi le public montréalais par sa musique originale, son dynamisme et sa présence sur scène. Ce groupe d’origine new-yorkaise parcourt une grande myriade de genres musicaux depuis déjà 20 ans. Depuis de nombreuses années, on qualifie Blue Man Group comme étant révolutionnaire, musicalement solide et théâtralement impressionnant.
C’est dans une mise en scène extraordinairement complexe que, jeudi soir passé, le spectacle s’est déroulé avec une synergie parfaite entre les éclairages, les projections vidéos et la musique. Bombardé d’effets sonores et visuels ingénieux, le jeu des trois musiciens bleus est définitivement au cœur du spectacle. Leurs mimes, expressions et attitudes sont si explicites que l’usage de la parole leur est complètement inutile. Faisant participer le public tout au long du spectacle, Blue Man Group a créé un lien particulier avec la foule qui l’a d’ailleurs démontré par sa grande satisfaction.

Bref, un spectacle qui passionnera certainement les grands amateurs de musiques comme les néophytes.

PATRICE OUIMET
Blue Man Group
Centre Bell
25 septembre 2008

dimanche 28 septembre 2008

Wave

Cet automne, le chorégraphe Sylvain Émard présente le dernier volet de sa "Climatologie des corps" à l'Usine C. Un spectacle traitant de l'environnement influençant les corps, souvent victimes des transformations extérieures. Un éclairage et une trame sonore saccadés, voire agressifs, qui ne peuvent laisser le spectateur indifférent.

Une chorégraphie exigeante, quoique quelque peu répétitive. Les cinq danseuses ont toutefois relevé le défi avec brio. Un spectacle physique où les points de repère se font rares. Le public est charmé et ne peut qu'admirer ces artistes qui, durant un peu plus d'une heure, honorent le travail et la créativité de Sylvain Émard. Ce dernier a plus d'une quinzaine de créations à son actif, lui ayant mérité de nombreux prix au cours de sa carrière. Il revient d'ailleurs d'Italie, où il a collaboré avec Robert Lepage, pour l'opéra "1984".

Enfin, les amants de la danse contemporaine ne seront pas déçus du dernier volet de la trilogie de Sylvain Émard. Toutefois, les initiés risquent d'en sortir légèrement étourdis par la chorégraphie bien distinctive et fidèle à son créateur. "Wave" est un spectacle exigeant, physique et bien ancré dans la réalité d'aujourd'hui.

MARIE-EVE JACQUES

"Wave"

Avec Karissa Barry, Sarah Murphy, Erika-Leigh Stirton,

Catherine Viau et Megan Walbaum

Chorégraphie de Sylvain Émard

Usine C

du 9 au 20 septembre 2008

vendredi 26 septembre 2008

Le Palier

Une femme d’âge mur et un jeune adulte vivent sur le même étage d’un bloc d’appartements. L’un à la vie devant soi alors que l’autre voit la sienne arriver à son terme. Une rencontre intergénérationnelle tout d’abord peu probable se transforme doucement en amitié. À ce moment-là, difficile de cerner qui veille sur qui. Est-ce si important? Tout ce qui les opposait à prime abord leur permettront de vivre plus intensément et les lieront jusqu’à la mort...

Grâce à un texte et une mise en scène d’une simplicité déconcertante, «Le Palier» permet une belle initiation au monde théâtrale. Pour ceux déjà initiés, on a l’impression de revenir à un théâtre dans lequel le spectateur n’est pas perdu dans les méandres d’un décor à n’en plus finir et des costumes où la dentelle étouffe le jeu du comédien. Et tout ça fait du bien.

Marie-Ginette Guay, dans le rôle de Julie, offre une prestation délectable alors que Lucien Ratio, à peine sortie du Conservatoire d’art dramatique de Québec, relève le défi d’incarner Nicolas avec brio. Bref, un duo étonnant sachant rendre l’ordinaire extraordinaire.

ANDRÉE-ANNE BRUNET

"Le Palier"
Avec Marie-Ginette Guay & Lucien Ratio
Mise en scène de Frédéric Dubois
La Licorne
du 16 septembre au 4 octobre 2008

jeudi 25 septembre 2008

Oh les beaux jours

Becket est loin d’être accessible aux gens désirant s’initier à l’art théâtral puisque, bien que porté par des comédiens chevronnés, ses textes sont lourds, lourds de sens, lourds de silence. Et «Oh les beaux jours» ne fait pas exception. Pourtant, la pièce est une réussite grâce à la renversante performance de la magnifique Andrée Lachapelle. Grande dame élégante du théâtre québécois, Mme Lachapelle offre un monologue d’une heure trente et ce, de façon totalement raffinée.

Becket nous présente Winnie, une femme simplette enterrée jusqu’à la taille dans un banc de sable. Elle résiste mais ne cherche pas à se battre. Pourtant, elle refuse de mourir. En fait, elle ne se donne pas le choix. Une femme vivant dans le passé puisqu’elle a compris, sans jamais l’avouer, qu’elle n’a pas d’avenir. Winnie est seule du haut de son monticule, seule avec ses grains de sable témoins des gestes répétitifs qu’elle pose jour après jour pour se donner l’impression de vivre. Elle s’acharne et résiste, lune après lune.

Il y a Willie, son mari qui n’est plus grand-chose. Une loque vivante ayant autrefois aimé. Il est une faible bouée pour Winnie qui, comme seule lumière dans son univers, espère l’entendre grogner à nouveau puisque la parole ne fait plus partie de son répertoire vocal.

Cette pièce souligne le retour d’André Brassard à la mise en scène après un accident cardiovasculaire. Intéressant de constater la façon dont Brassard a utilisé la Winnie de Becket comme thérapie, projetant du même coup un cri au monde entier comme quoi sa lutte est loin d’être finie. Chapeau à Brassard pour oser un retour sur les planches et pour oser s’attaquer à un Becket absurde et à une Winnie plus grande que nature.

Bref, «Oh les beaux jours» est une petite intrusion donc dans ce monde parallèle nous rappelant notre propre acharnement afin de trouver le bonheur à travers une multitude de futilités. Winnie ne fait que nous rappeler notre statut de grain de sable dans cette montagne de minéraux qu’est le monde!

ANDRÉE-ANNE BRUNET

"Oh les beaux jours"
Avec Andrée Lachapelle & Roger Larue
Mise en scène d'André Brassard
Espace Go
du 9 septembre au 11 octobre 2008

King Lear contre-attaque

Et si des clowns tentaient de comprendre Shakespeare? Et si, avec toute leur maladresse, leur naïveté, leur compréhension au premier degré, ils nous introduisaient à cet univers? Et si, s’empêtrant dans leur bouffonneries, ils mêlaient les différentes histoires mais arrivaient tout de même à nous faire croire que les Othello, Desdémonde, Iago, Hamlet et King Lear du grand Will sont vivants devant nos yeux?

D’abord joué à Québec au théâtre Périscope en 2004, les Productions Préhistoriques proposent à la population montréalaise un rafraîchissement théâtral d’une heure et quart où les références politiques, les jeux de mots et les procédés d’exagération et de répétition en mettent plein la vue.

Aux premiers abords, on croit assister à une pièce montée par des apprentis comédiens cégepiens. Un cow-boy, un chat, un matelot, un cuisiner, une princesse et un homme de Cro-Magnon se bouscule sur scène pour raconter King Lear. On abandonne rapidement l’idée jugée trop complexe. C’est alors qu’un simple mouchoir déclenche les foudres d’Othello. La douce folie opère et à ce moment, on se laisse prendre au jeu et on réalise que seuls des artistes calés en matière clownesque peuvent réussir à nous faire croire à des personnages aussi délurés sans pour autant tomber dans le cliché.

Qui aurait cru que Shakespeare pouvait être léger et drôle?


ANDRÉE-ANNE BRUNET

"King Lear contre-attaque"
Avec Alexia Bürger, Catherine Larochelle, Véronika Makdissi-Warren,
Sophie Martin, Francis Martineau et Alexandra Morais
Mise en scène par Jacques Laroche
Espace Libre
du 28 août au 13 septembre 2008

mardi 23 septembre 2008

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